Vodun Days 2024 a attiré de nombreux visiteurs tant locaux qu’internationaux. Cette manifestation culturelle a mis en avant les traditions Vodun du Bénin, en particulier dans la ville historique de Ouidah, qui fut un important centre de la traite des esclaves. Lors de ces festivités, il est arrivé parfois que des artistes brésiliennes, descendants des esclaves déportés en Amérique, aient présenté leurs tableaux à la caravane. Cependant, certains Béninois ont manifesté leur mécontentement en insultant ces femmes en raison de leur tenue qu’ils jugent inappropriée. Cette démarche est-elle effectivement fondée ? Dans une série de publications, nous parviendrons à analyser les répercussions de ce regard porté sur la communauté brésilienne, présente à la caravane.
Ces Brésiliennes, qui représentent une partie de la communauté des Afro-Brésiliens, ont choisi de préserver l’identité de leurs ancêtres africains à travers leur tenue vestimentaire. Leur nudité partielle évoque les conditions dans lesquelles leurs ancêtres ont été forcés de partir pour l’Amérique, dépossédés de leurs vêtements et de leur dignité. En adoptant cette tenue, ces femmes cherchent à rappeler cette histoire, à honorer leurs ancêtres et à préserver leur héritage culturel.
Cependant, cette tenue particulière a suscité des réactions négatives de la part d’une partie de la population béninoise, qui voit en elle une critique implicite de leur propre culture. Certains peuvent percevoir la nudité comme indécente, voire offensante. Ce rejet peut être compris comme la manifestation d’un conflit culturel complexe, dans lequel les valeurs traditionnelles sont mis en opposition avec les influences extérieures perçues comme aliénantes.
Afin de comprendre cette situation, il est essentiel de replacer les faits dans leur contexte historique et culturel plus large. Avant l’esclavage et la colonisation, les peuples africains avaient leur propre mode vestimentaire, qui reflétait leur identité culturelle. Les vêtements étaient souvent fabriqués à partir de matériaux locaux tels que le coton, le cuir ou le lin, et ils avaient une signification sociale et symbolique forte au sein des communautés.
L’arrivée des colons européens et le commerce des esclaves ont bouleversé ces équilibres. Les Africains réduits en esclavage étaient dépouillés de leurs vêtements et forcés de porter des habits occidentaux. Cette dépossession symbolique était le reflet de leur perte d’identité et de leur asservissement. Ainsi, la tenue traditionnelle des Brésiliennes lors de Vodun Days peut être vue comme une réappropriation de cette identité perdue, une manière de réaffirmer leur héritage africain face à l’oppression coloniale.
Il est donc injuste de reprocher à cette communauté d’avoir préservé l’identité de leurs ancêtres de cette manière. Au contraire, leur choix de tenue reflète leur courage et leur détermination à se reconnecter avec leur histoire, malgré les multiples générations qui les séparent de leurs ancêtres. Ils font preuve d’une volonté inébranlable de maintenir vivante la culture et les traditions africaines, et cela doit être respecté.
Il convient également de souligner que la tenue traditionnelle africaine est diverse et variée, reflétant les spécificités régionales, ethniques et historiques de chaque groupe. Cela démontre la richesse et la diversité des coutumes et des modes de vie africains avant l’arrivée des colonisateurs. Il est donc nécessaire de reconnaître cette pluralité et de valoriser la préservation de cette identité culturelle.
Il est donc important de considérer la tenue vestimentaire des Brésiliennes sur scène, lors de Vodun Days à Ouidah dans son contexte historique et culturel. Cette tenue n’a pas pour but de choquer ou d’offenser, mais de rappeler l’histoire et de préserver l’identité des ancêtres africains. Seul en embrassant cette diversité et en rejetant les stéréotypes et préjugés, nous pourrons réellement comprendre et apprécier les cultures africaines dans toute leur complexité.
Hugues Hector ZOGO